quand mon...page 3
Et puis il y a ceux qui aiment leur travail (sans pour autant le vivre comme une passion), et/ou qui aiment leur entreprise (mais pas obligatoirement leur travail), ceux qui accordent à leur travail une dimension purement alimentaire (= moyen d'avoir un revenu régulier), et tous les autres, qui -au final- vont se déclarer épanouis. Tout ce que ces travailleurs ont en commun c'est qu'ils ne surinvestissent pas émotionnellement leur travail. Ils relativisent et arrivent à tirer le positif de leur situation. Comme quoi la frontière épanouissement personnel/épanouissement professionnel est bien mince, à tel point qu'il est difficile de faire la part de l'un sur l'autre.
Olivier, 34 ans, agent de quai sur le MIN de Rungis: "mon job n'est pas super intéressant, je n'apprends pas grand chose, je fais de la manutention. Mais quand je rentre le soir à la maison, l'avantage c'est que je ne ramène pas de boulot! Et puis il y a une bonne ambiance, on travaille dur mais on s'entend bien. J'aime aussi travailler en horaires décalés, j'ai l'impression d'avoir plus de temps la journée pendant que d'autres sont au bureau."
Zoé, 39 ans, audioprothésiste (salariée): "oui je me sens épanouie dans mon travail et oui il y a répercussion sur mon épanouissement personnel. Ma satisfaction est de rendre mes clients contents. Mon travail me structure à titre personnel: quand je suis dans une période de ma vie où je me pose des questions sur mes capacités, et bien ça me rassure de voir que oui par exemple dans telle situation professionnelle j'ai été "capable de"...c'est bon pour mon estime de moi-même, je vois que je suis capable d'agir. Savoir qu'on a une valeur dans le travail permet de se rassurer personnellement. Il m'aide à savoir ce que je vaux. Et puis j'apprends beaucoup, les nouveautés du secteur etc...Mais si demain je gagne au Loto, j'arrête de travailler!"
Chrystelle, 32 ans, employée de banque (chargée d'accueil): "me dire épanouie au travail c'est beaucoup!!!! C'est pas le métier dont j'ai toujours rêvé mais bon...c'est celui que je fais! Maintenant, c'est clair que même si mon travail ne m'épanouit pas vraiment, il ne me déplait pas! En fait, ce que je trouve bien dans mon travail, c'est tout sauf mon travail justement! J'ai des conditions avantageuses et j'en ai bien conscience quand je regarde autour de moi, rien que les avantages liés au comité d'entreprise, j'ai accès à une offre variée pour les spectacles, les places de cinéma, les locations de vacances...et puis j'ai pas mal de vacances, c'est assez pratique quand on est maman! Après, et bien je dirai qu'au niveau des conditions de travail en elles-mêmes, ça va...Je fais mon travail avec application donc je ne suis pas embêtée! Et puis je ne fais pas partie des gens qui se font des plans de carrière, moi si je travaille, c'est pour avoir un salaire, et mon salaire me permet de m'épanouir dans ma vie personnelle. Alors pour répondre à votre question, oui mon travail, ou plus exactement la rémunération liée à mon travail, me permet de m'épanouir personnellement!"
Thierry, 53 ans, enseignant en CM2 (Education Nationale): "clairement oui. Je pars du principe que je suis un individu dans sa globalité donc automatiquement il y a des incidences travail/vie personnelle. Déjà je fais un métier que j'ai choisi, je ne le subis pas. Dans mon métier, je donne beaucoup de mon temps, quelquefois trop sans doute. Mais en retour j'ai la reconnaissance de mon travail, par la transmission des savoirs, et ça je le vois tout seul avec le niveau de mes élèves qui va évoluer tout au long de l'année scolaire. C'est très gratifiant à titre personnel. Mon métier fait partie de ma construction et je ne l'ai certainement pas choisi par hasard. Enfant, j'étais moi-même en situation d'échec scolaire et ça a entrainé une profonde souffrance. Etre enseignant m'a permis de prendre une revanche sur moi-même, ça a été un formidable outil de développement personnel pour moi. Ce qui m'intéresse le plus dans mon travail aujourd'hui, c'est de comprendre ce qui fait obstacle dans les apprentissages des enfants. Chercher et trouver le levier."